Le nouveau président de la Commission européenne devrait agir de manière décisive pour rendre les délibérations à Bruxelles plus responsables devant les électeurs et les parlements nationaux.
Cette publication fait partie du projet « Reshaping European Democracy », une initiative du programme « Democracy, Conflict, and Governance » de Carnegie et du Mouvement européen international.
Ces dernières années, certains États européens ont subi une régression spectaculaire, tandis que d’autres ont connu des formes plus subtiles d’érosion démocratique. Plusieurs gouvernements de l’UE ont restreint les libertés civiques. Un débat animé s’est engagé sur le degré de perte de confiance des citoyens européens dans les valeurs démocratiques fondamentales. En général, la demande de participation démocratique dépasse l’offre, tant au niveau national qu’au niveau de l’UE.1
En réponse à ce défi, la nouvelle présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a appelé à un « nouvel élan pour la démocratie européenne ». Elle a suggéré d’organiser une conférence sur l’avenir de l’Europe dans laquelle les citoyens européens « joueront un rôle actif et de premier plan ». Elle a promis de formuler un nouveau plan d’action pour la démocratie européenne, axé en particulier sur la sphère numérique.2 La promesse de la nouvelle Commission ouvre de nouvelles possibilités d’innovation et d’expérimentation démocratiques. Les dirigeants européens s’engagent fréquemment à défendre et à approfondir la démocratie, mais il est rare qu’ils passent à l’acte lors de crises plus urgentes. Les autorités européennes et nationales semblent reconnaître l’importance de cet effort, mais l’amélioration de la démocratie apparaît souvent comme un objectif plus abstrait et moins prioritaire que la fixation de l’euro, l’accord sur les quotas de migrants ou la négociation du budget.
L’une des pires choses que les nouveaux dirigeants de l’UE pourraient faire serait de lancer des initiatives grandiloquentes qui n’aboutiraient pas à des changements significatifs et tangibles. Si l’on suscite les attentes des citoyens pour ensuite les décevoir, la confiance et la foi dans les normes démocratiques seront encore plus faibles qu’elles ne l’étaient auparavant. On peut se demander si une conférence de haut niveau sur l’avenir de l’Europe est vraiment le moyen le plus efficace de remédier au malaise démocratique de l’Europe. Les débats sur l’avenir de l’Europe et la « poussée pour la démocratie européenne » risquent d’être trop enchevêtrés l’un dans l’autre. Ces deux questions sont liées l’une à l’autre, mais elles ne sont pas identiques. Une conversation interminable sur la réinvention complète de l’UE pourrait simplement retarder et détourner l’attention de la nécessité d’une réforme démocratique concrète et ciblée.
Il est important que les institutions de l’UE et les gouvernements des États membres réussissent à mener à bien les réformes à ce moment décisif. L’agenda de la réforme démocratique européenne doit être large et multiforme, avec des réformes non seulement au niveau de l’UE, mais aussi aux niveaux national et infranational. Les bureaucrates de l’UE et les représentants des gouvernements des États membres doivent poursuivre simultanément ces différents niveaux et types d’innovation démocratique et travailler en tandem.
Il existe au moins six moyens constructifs et pratiques par lesquels les dirigeants européens peuvent commencer à renforcer la démocratie européenne. Ces idées visent à aider les institutions de l’UE à relier les réformes vers le bas et à les utiliser pour faciliter les améliorations démocratiques nationales et infranationales parallèles. Plutôt que de revenir sur les sujets de débat les plus couverts, tels que les mesures punitives en matière d’État de droit contre la Hongrie et la Pologne, les diverses racines du populisme ou la réglementation des entreprises technologiques, ce document explore des domaines moins couverts mais éminemment réalisables de progrès potentiel. La réforme démocratique ne part pas d’une toile blanche. De nombreuses options sont à l’ordre du jour depuis plusieurs années, ce qui montre qu’il existe une dynamique positive que l’UE peut exploiter.
Les six idées du document sont les suivantes :
- Élaborer un récit démocratique convaincant contre la montée des valeurs illibérales.
- Mettre en place un mode d’élection plus démocratique des dirigeants européens.
- Favoriser une forme plus transnationale de politique européenne des partis.
- Améliorer les consultations directes des citoyens et la participation démocratique.
- Adopter une approche plus positive de la démocratie numérique qui ne se contente pas de gérer les risques liés aux nouvelles technologies, mais qui exploite également leur potentiel.
- Renforcer la participation du public par le biais d’une initiative citoyenne européenne (ICE) remaniée.
Il n’y aura pas de solution miracle pour sauver ou transformer la démocratie européenne. Plutôt que d’essayer d’aborder toutes les dimensions de la démocratie en Europe, il est judicieux de sélectionner un certain nombre d’idées politiques concrètes qui pourraient contribuer à améliorer la démocratie européenne de manière spécifique. Aucune de ces mesures ne sauverait complètement la démocratie, mais ensemble, ces progrès modestes et progressifs commenceraient à faire une différence appréciable dans la qualité du processus démocratique à travers l’Europe.
Auteurs : Richard Youngs, Stephen Boucher, Israel Bulter, Maarten De Groot, Elisa Lironi, Sophia Russack, Corina Stratulat, Anthony Zacharzewski
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